
Pour l'abolition de la prison
Publié le 06 Juin 2015 (Mis à jour le :25-07-2015)
Au-delà de l'ignominie d'enfermer des êtres vivants en les privant de tout, y compris d'identité, la prison n'est pas une solution mais un problème dont il faut se libérer !
Comment peut-on expliquer, alors que les crimes et délits diminuent, les prisons se remplissent ? La population carcérale a augmenté de 52 % en à peine 10 ans, sans que les statistiques n'y trouvent une explication logique de vases communicants : la régression des délits n'est pas liée à l'accroissement des prisonniers. Il y a simplement une augmentation de la répression : des délits qui, il y a quelques années, ne faisaient l'objet d'aucune incarcération sont aujourd'hui punissables de prison. Les peines sont de plus en plus lourdes et les aménagements de peine de plus en plus restreints. On enferme et on exclut plus fort et plus longtemps. C'est la seule et vraie raison.
On prétend que la prison protège la société et permet d'amender les prisonniers. C'est absolument faux puisqu'au contraire, en nourrissant la récidive, elle fait exactement le contraire.
Par exemple, on nous dit que les rues sont remplies d'assassins et de violeurs. Il est bon de rappeler que 80 % des prisonniers, autrement dit 4 sur 5, sont condamnés à des peines de 2 ans et moins. Si on regarde ceux qui sont condamnés à 1 an et moins, ils représentent 66 %, soit les 2/3. Il y a donc très peu de gens qui mettent la société en péril. Excepté quelques serials killer et quelques violeurs compulsifs, (en gros 100 à 150 personnes en tout et pour tout qui effectuent, actuellement, leur peine dans les prisons Françaises), nous n'avons à faire qu'a de la délinquance banale. Par contre, les vrais voleurs, les grands délinquants, ceux qui sont en costume et en col blanc, eux, représentent un véritable danger en s'accaparant les biens collectifs avec une avidité sans nom, en détournant des sommes considérables, en s'arrangeant entre copains coquins au sein de leur cercles fermés, sans jamais être punis. Les systèmes répressif, judiciaire et pénitentiaire ne protègent que les riches et leurs serviteurs qui se sont faits élire au pouvoir, flanqués de leurs chiens de garde que sont les médias.
On ne trouve que des pauvres en prison ! Ce sont les conditions sociales, où les injustices flagrantes produisent la misère et la maintiennent, qui, au premier chef, créent la petite délinquance de ceux qui ne veulent pas se soumettre à cette société inique. Les puissants manipulent la peur et la sécurité pour pouvoir se gaver en toute tranquillité en laissant croire qu'ils travaillent pour notre bien-être en construisant un environnement sur-assuré où vivre ne sera plus un risque. C'est ce risque qu'on appelle à présent dangerosité. Ils désignent des boucs émissaires qu'ils érigent en exemple pour détourner les regards, menacer ceux qui seraient tentés de contourner leur lois, et surveiller les ghettos qu'ils ont bâtis. La loi de renseignement, votée il y a peu, en est la parfaite illustration. Le phénomène des Charlie a été une illusion orchestrée pour en faire un vrai prétexte à diminuer encore nos libertés.
La prison est avant tout un outil de gestion des inégalités. Le pouvoir de punir s'est affranchi des justifications rationnelles pour maintenir ces inégalités. Les faits sanctionnés par la justice ne sont même plus considérés comme des délits, mais deviennent, eux aussi, un prétexte pour offrir une solution répressive à la question sociale en la fondant sur un argumentaire moral. Passez seulement une après-midi dans un tribunal de comparution immédiate, vous y verrez cette triste réalité de stigmatisation ethnique et sociale.
Comment amender un petit délinquant alors que tout est fondé sur l'élevage : le système éducatif, qui n'apprend plus le discernement (l'a-t-il fait un jour ?) mais formate et n'autorise qu'une ridicule liberté conditionnelle. Et lorsque cet élevage rate, on le transforme en dressage pour ceux, qui, comme par hasard, ont déjà été exclus et se rebellent contre leur pauvreté.
![]() | La prison dans ses horreurs au quotidien, dans son arbitraire absolu où l'on fait disparaître l'individu sous un numéro d'écrou, dans sa répression interne en cascade, qui s'ajoute à la première, ne fait que briser ou révolter les gens qu'on y enferme. Ils en sortent ou comme moutons cachetonnés ou comme des rebelles de plus en plus durs qu'on ré-enfermera jusqu'à les briser à leur tour. Le grand mensonge de la réinsertion n'est là que pour dissimuler le massacre organisé et faire oublier les presque 150 suicides par an, taux 7 fois plus élevé que dans la vie dite normale ou normalisée. On ne parlera pas des tentatives de suicide (3 par jour) pour ne pas ajouter à la pornographie de l'émotivité ambiante. La rédemption n'est que la théorie morale des puissants, à des années lumière de la réalité de l'humain, qui se substitue au mot de soumission. C'est juste une subtilité sémantique. On nous raconte qu'on va humaniser la prison ! Mais comment parler d'humanisme à propos d'enfermement. Cette formulation est honteuse et abjecte, indigne de l'essence même de l'humanité. |
La prison est une aberration indéfendable qu'il faut détruire pour espérer construire un véritable vivre ensemble.
Texte écrit par Alain Cangina
Et crié dans le cadre d'une journée d'action du GENEPI par le crieur de la Guillotière au Bruit qui Court